4. Crise et contestation (1973-1989)

Compléter le réseau autoroutier

Non seulement la crise économique et la contestation contre les autoroutes, mais aussi les réformes de l'Etat successives ont été déterminante dans la construction des autoroutes pendant les année 1970 et 1980.

La réduction du programme autoroutier se déroula en deux phases et aboutit à l'image du réseau actuel des autoroutes belges. Après la première crise pétrolière en 1973, le ministre Alfred Califice réduisit le programme de 2400 km à 2009 km; en 1976 le ministre Louis Olivier fut responsable d'une deuxième réduction, cette fois-ci à 1846 km. Ce sont surtout les autoroutes qui faisaient partie du modèle par grillage qui durent disparaître. Olivier déclassa beaucoup d'autoroutes en voie express. De celles-ci, un nombre limité reçut finalement à nouveau le statut d'autoroute, par exemple la E429 (A8). Après 1976, on n'alla pas plus loin qu'une révision à grande échelle du programme.

Le programme autoroutier de 1976.
Programme autoroutier de 1976

On peut constater la même évolution dans la construction des autoroutes: plus d'argent fut consacré aux voies ordinaires, par conséquent les travaux aux autoroutes se déroulèrent plus lentement. Jusqu'en 1975 et de nouveau à partir de 1979, des limitations de crédits considérables furent exécutées pour combattre l'inflation. Le ministre Jean Defraigne nomma une raison supplémentaire pour les retards: la construction de rings, qui fut prévue après l'achèvement des grands axes de liaison, ne nécessitait pas seulement des budgets plus importants, mais aussi un délai d'exécution plus longs de par leur situation dans ou près de régions fortement peuplées. Mathot, ministre entre 1977 et 1980, estimait que "des grands projets, seulement ce qui était nécessaire à un achèvement harmonieux des tronçons entamés devait être conservé."

La politique de sobreté pendant les années 1980 laissa encore moins d'espace pour des investissements dans la construction d'autoroutes. La suppression des directions régionales d'autoroutes en 1975 et celle des intercommunales en 1982, de même que la nouvelle appellation du Service des Autoroutes depuis 1981, à savoir 'Service des Tracés speciaux', démontraient que les autoroutes étaient peu à peu mise au second plan.

Longueur du réseau autoroutier, 1950-1980.
Longueur du réseau autoroutier

De 956 km à la fin de 1973, le réseau autoroutier se développa jusqu'à 1130 km à la moitié de l'année 1977, 1395 km à la fin de 1984, et 1613 km au moment de la régionalisation en 1989. Pendant les années 1970 on remarque surtout une condensation du réseau en Flandre; durant les années 1980 on travailla surtout au sud du sillon Sambre et Meuse.

Développement du réseau (1973-1988). Vous trouverez une liste des mises en service année par année dans la section Cartes du réseau.
Développement du réseau (1973-1988)

La création d'une nouvelle route ou d'une autoroute se déroula à partir des années 1970 beaucoup plus difficilement qu'auparavant. En 1974 les premières institutions régionales virent le jour. Pour les Travaux Publics cela eut comme conséquence l'intervention des dits Comités Ministériels des Affaires Régionales. Ces comités, trois en total et composés de sénateurs, formulaient chacun pour leur région des conseils à propos des tracés des routes planifiées. Ils avaient en outre beaucoup d'influence lors de la rédaction des plans de secteur définitifs. Un grand nombre de projets (surtout en Flandre) disparurent de cette manière dans les placards.

Lors de la deuxième réforme de l'Etat (1980) les comités quittèrent la scène, mais les régions fraichement créées reprirent leur fonction. Elles purent faire valoir leur pouvoir encore plus fortement que leurs prédécesseurs, car elles étaient responsables de l'attribution de permis de bâtir pour la construction de certaines routes ou tronçons. L'achèvement de par exemple l'E403 (A17) et de l'E429 (A8) fut empêché pendant des années à cause du fait que ces routes se trouvaient sur plusieurs régions.

La croissance de la 'conscience écologique' dans la population força l'Administration des Routes à consacrer plus d'attention qu'auparavant à la protection de l'environnement. Le 10 mars 1977 le ministre Olivier fonda une Commission Ecologique qui étudierait l'impact des travaux d'infrastructure prévus sur l'environnement, et prendrait des mesures pour limiter celui-ci au maximum. Une des affaires pour lesquels la population était très sensible à partir de la fin des années 1970 était le problème des nuisances sonores. Probablement que cela avait aussi à voir avec l'augmentation du trafic. C'est dans cette période que les premiers panneaux anti-bruit furent installés.

L'apparence des autoroutes ne changea par ailleurs pas beaucoup. L'Administration des Routes fit de la construction de places de parking et de facilités adjointes une priorité, pourvit toutes les sorties de panneaux indiquant le numéro de sortie (1979), et plaça par après des panneaux blancs et bleus qui annoncaient les rivières et les ouvrages d'art (1984), ainsi que les panneaux jaunes aux frontières entre provinces (1986) et les panneaux bruns à proximité des curiosités touristiques (1986).

Nouvelle signalisation le long des autoroutes belges.
Nouvelle signalisation

L'introduction d'un nouveau système de numérotation routière à partir de septembre 1985 fut d'une plus grande importance. De par l'expansion spectaculaire du réseau routier pendant les trente dernières années, la logique dans la numérotation avait complètement disparue. La nouvelle numérotation classa les routes selon leur importance réelle. En même temps on introduisit la numérotation européenne actuelle, qui fut approuvée par la plupart des pays européens dans une deuxième Déclaration de Genève (1975).

En 1985 l'économie belge commença à s'améliorer. Etait-ce sous l'impulsion de ce redressement que le ministre Olivier communiqua deux ans plus tard d'une manière convaincue "que pour la fin de l'année 1993 plus aucun travail public ne devrait être réalisé"? Le ministre devait être dans un état particulièrement optimiste. Lui-même savait que lentement mais sûrement un nouveau phénomène surgirait, qui déterminerait entièrement la politique routière dans le futur. A partir de 1986 les premières files structurelles apparurent, ou du moins elles furent considérées depuis lors comme problématiques. Bien sur l'augmentation inarrêtable du trafic, en particulier les navettes, était le premier responsable. Entre 1975 et 1990, l'intensité du trafic sur nos autoroutes avait augmenté en moyenne de 111%, et cela alors que le rhythme de la construction d'autoroutes avait fortement réduit et que peu d'autoroutes existantes avaient été élargies.

Le 'choc pétrolier inverse' qui se produisit en 1986 accéléra encore le processus. "A partir de comparaisons très provisoires entre 1986 et 1985 il y aurait une augmentation du trafic de 6% à 7%," c'est ce qu'Olivier répondit à une question parlementaire. Les premières files se situèrent sur l'E40 entre Bertem et Sterrebeek, d'une part, et entre Ternat et Grand-Bigard, d'autre part, sur l'E313 à hauteur de Wommelgem, et sur l'E411 entre Overijse et Notre-Dame-au-Bois. Le grand ring de Bruxelles aussi constituait dès ses débuts un point noir: les sections les plus chargées se situaient entre Hoeilaart et Notre-Dame-au-Bois, et entre Grand-Bigard et Vilvorde. Ce sont toujours ces tronçons, à côté de tant d'autres, qui actuellement sont mentionnés chaque matin lors du trafic info. Le ministre Olivier décida de créer un groupe de travail qui s'occuperait de cette problématique. Néanmoins la régionalisation suivit très vite. Dès lors les régions - et principalement la Région Flamande - reçurent la tâche de trouver une solution durable pour ce nouveau phénomène, qui vers la fin du siècle se manifesterait de plus en plus fort.

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